Désordre des possibles

Julio propose à l’Espace Voltaire, l’exposition Désordre des possibles qui réunit des œuvres de dix-sept artistes.

Cette exposition part d’un constat : la discontinuité du temps présent. Elle propose des hypothèses pour redéfinir la place de l’humain, en faisant appel à des nouvelles mythologies, des hybridations, et d’autres combinaisons possibles du morcellement présent.

Les désordres générés par les effets de l’activité humaine nous obligent à imaginer des nouveaux paradigmes et, ce faisant, à redéfinir notre place dans la sphère du vivant. La sensation que le présent se déroule sous la forme d’une linéarité implacable et rassurante a disparu. Nous traversons la discontinuité comme si nous surfions sur un accident de terrain, une courbe de niveau géographique qui écrit la cartographie du temps. L’évidence d’une discontinuité peut être comprise comme un opérateur de processus, une porte ouverte à la spéculation qui permette la construction de possibles dans différents types de registre (représentationnel, imaginaire, performatif, esthétique, etc.). Ce que Bataille nomme la “discontinuité de l’être” s’étend dans ce cas, du plan individuel jusqu’au au lieu qui nous accueille en tant qu’êtres vivants.

Nous avons conscience de la nécessité d’une réinvention du monde, même si cette idée est presque devenue un lieu commun. Ce besoin s’incorpore dans l’œuvre de maints artistes qui, chacun à sa manière, s’essayent à une recomposition spéculative à partir des multiples aspects de l’existant dans leurs partialités. Ainsi, imaginent-ils des possibles pour redéfinir la place de l’humain en lien à un nouvel ordre (dés-ordre?) naturel.

Dans cette exposition, certaines œuvres reflètent l’impossibilité de procéder à cette redéfinition, d’autres rendent compte des obstacles rencontrés, ou de l’absurdité d’une telle prétention. Certains s’inclinent pour un réveil archaïque, un saut disruptif vers la mythologie ou vers l’histoire ancestrale, pour ramener au présent des signifiants oubliés et définir des nouveaux rituels.

Leurs propositions s’exercent à « construire sur des ruines » (selon la formulation de la philosophe Isabelle Stengers) par l’hybridation des ressources existantes. Elles transforment «ce qu’on a sous la main » dans un réassemblage du morcellement, en effectuant une relecture des fragments matériels et numériques.

Ce désordre des possibles s’ouvre devant les artistes comme devant d’autres acteurs du monde qui font sienne cette tâche. L’idée porte en elle-même une absurdité qui se révèle être un point de départ.