La fascination de la faille

Hugo Aveta est un artiste argentin né en 1965 à Cordoba où il vit encore aujourd’hui. Adolescent pendant la dictature militaire (1976-1983), il est toujours empreint des traumatismes qu’il a vécus et qui ont marqué sa jeunesse, tant ceux de son pays que les drames que les pays environnants, le Paraguay, le Chili ont aussi vécus.

Artiste pluridisciplinaire, il met en œuvre la photo- graphie, la sculpture, la vidéo ou le son, pour embrasser et évoquer ces sujets qui le façonnent, celui de la catastrophe, celui de la mémoire et sa fabrication ou l’évocation des souvenirs.

Nourri de psychanalyse, il défend dans les images qu’il fabrique, bidimensionnelles ou dans l’espace, que la mémoire est (re)création, mais qu’elle est aussi, nécessairement, composée d’oublis et de silences conditionnels à la survie. Elle est création.

Il y a une reconnaissance parfaite entre son processus de création, de construction de ses images à partir de photographies souvent trouvées ou de maquettes qu’il réalise et la mémoire qu’il explore, « comme faculté et comme témoignage, comme opération et construction, processus personnel et collectif ». Le temps est sa matière, l’humain sa matrice.

Hugo Aveta, la construction de l’équilibre

Invité au MAC VAL dans le cadre de « Persona grata ? », et d’une résidence co-construite avec BIENALSUR, il a conçu pendant l’été 2019 un projet pour le lieu, cet espace si particulier du musée. Le projet a grandi avec le temps de son séjour, et s’est construit avec ses proches, lui-même fabriquant, construisant «Je n’ai pas peur» dit-il, il aime faire (aussi) avec les mains.

Au cœur de ce qui est devenu un réel environnement, La fascination de la faille, une œuvre immense, un pont qui s’effondre en son centre, comme énonçant son renoncement à sa fonction de lien, de mise en relation, de main tendue. L’artiste évoque à son sujet sa fascination de la faille, son destin inattendu incarné par son effondrement sur lui-même. Pourtant, il résiste, et existe, son sens s’exprime encore si sa fonction est mise en échec.

«Le pont a en son centre, comme un ventre, ces forces en lutte, menaçant de s’effondrer, plein d’incertitudes, de peurs, de dangers, d’espoirs, de libertés, de sorties, le tout dans un espace comprimé dans l’oppression d’une lutte invisible» (Hugo Aveta).

Un territoire de conflits, comme les évoquent, dans une dimension universelle, les deux autres œuvres de l’exposition.

Les deux photographies de la série « El silencio del mundo » sont issues d’images trouvées sur Google Map de la frontière américano mexicaine, et du Tchad et du Soudan (2017).

Enfin, la vidéo Tracción a sangre (2015), est un ensemble d’images, dessins et photographies filmés. D’après Adriana Almada, «Aveta compose des vidéos, mais ne filme pas. Photogramme après photogramme, il les soumet à l’alchimie des émulsions magiques, une énergie pour faire disparaître les corps».

La résidence de Hugo Aveta s’inscrit dans le cadre de BIENALSUR (Argentine).